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Bart De Pooter, interview & 10 commandements pour Pastorale**

Bart De Pooter, interview & 10 commandements pour Pastorale**

Etoile parmi les étoiles, trônant au cœur du firmament, le chef flamand Bart De Pooter, n’a pas perdu son temps pendant le confinement. Bien au contraire et c’est tant mieux ! Ainsi, dès les premières heures du lock down et durant les douze semaines de celui-ci, il s’est montré aussi réactif que créatif. Ceci en imaginant diverses solutions aux règles de sécurité sanitaires imposées pour la réouverture de son restaurant. Soit 10 solutions, qu’il a appelées « commandements » en référence au passé historique de son restaurant « Pastorale » n’étant autre qu’un ancien presbytère. Des commandements parfaitement adaptés au restaurant, aux clients et au personnel comme à l’environnement sanitaire des lieux. De légitimes consignes imaginées pour que chacun ici se sente en parfaite sécurité et ne perde rien du grand plaisir de s’attabler, voire de travailler, en ces lieux … célestes

 

Interview d’un chef créatif et éclairé

D’emblée, Bart De Pooter à la question de savoir comment il a vécu le confinement nous dit : « Le confinement a été l’une des meilleures choses qui me soit arrivée. Jamais, à 52 ans, je n’aurais pensé avoir une telle occasion et autant de temps pour la réflexion, pour me pauser et prendre ce temps, si rare auparavant, de pouvoir réfléchir à mon métier et à ce que j’allais en faire à l’avenir. Malgré l’aspect très négatif de la crise, cela a représenté une occasion unique pour moi et j’ai très rapidement imaginé des solutions. Je n’ai pas perdu de temps et, avec toute mon équipe, nous avons mis de nouvelles idées, de nouveaux projets en place. »

 

Joëlle : Comment avez-vous vécu ce confinement, cette fermeture obligatoire des restaurants et votre vie personnelle pendant ces 12 semaines d’arrêt d’activité ?

Bart : cette période qui arrive dans ma vie alors que j’ai 52 ans, m’a permis de prendre les choses avec recul. Le Covid a été pour moi une façon de regarder en arrière, le parcours effectué, puis d’envisager l’avenir. Pendant la crise j’avais mes filles avec moi mais aussi mes parents, tout le monde était autour de moi dans notre maison familiale mais je travaillais tous les jours. Je m’arrêtais juste à 16 h puis cela nous a permit de cuisiner ensemble. Avec mon équipe, nous avons tout fait et imaginé pour que, dès la réouverture, nous puissions rendre la confiance aux gens, faire en sorte qu’ils reviennent à Pastorale en toute sécurité. Je n’ai pas peur quand je vois le soutien que nous avons, par exemple avec la diminution de la TVA. Je pense que l’on va tous voir la nécessité de maintenir cela et que ça restera. Le Covid a amené l’Horeca à être plus sain qu’avant. Tout le monde fera plus attention à la sécurité sanitaire et je pense que cela laissera des traces positives.

 

En pratique, quelles sont les idées, les projets, voire les dix commandements pour le restaurant que vous avez imaginé pendant le confinement ?

Bart : J’ai tout d’abord analysé la situation pour moi-même. Je me suis demandé ce que j’attendrais d’un restaurant si je devais être client et aller m’attabler ailleurs. Quels seraient les doutes, les craintes que j’allais avoir. Puis j’ai pensé qu’il fallait garder le sens de l’humour, le sourire, l’hospitalité et que les gens puissent toujours avoir la même expérience exceptionnelle qu’avant tout en respectant la distanciation sociale et les mesures d’hygiène. Je me suis demandé comment intégrer le Covid-19 à l’expérience. J’ai alors très rapidement commandé 70 masques transparents en Chine. Ce sont des masques en plexi réutilisables très légers et très confortables qui donnent l’avantage aux clients de pouvoir voir le personnel sourire et à ce personnel, tant en salle qu’en cuisine, de ne pas être dans l’inconfort pour travailler. Cela permet donc une communication naturelle, une interaction plus simple. Il a fallu deux mois et demi pour les recevoir mais heureusement je les ai commandés dès le début du confinement, ils étaient donc là temps pour la réouverture. Aujourd’hui, j’ai vu que plusieurs collègues les utilisaient également.

Ensuite, j’ai acheté et fait placer dans le vestiaire où nous mettons les manteaux, vestes des clients, un générateur d’ozone. Ce petit appareil désinfecte l’air et combat, notamment, les bactéries et les virus. L’air du vestiaire est d’abord aspiré par l’arrière de l’appareil. A l’intérieur, l’air est filtré au moyen d’un filtre à air et d’une lampe UV spéciale. Ensuite, l’air filtré est guidé le long d’une plaque en céramique intégrée qui transforme l’oxygène en ozone via une décharge électrique. Enfin, l’ozone est ventilé dans le vestiaire par l’avant de l’appareil afin de désinfecter le vestiaire – ainsi que le manteau du client – et de lutter contre les virus et les bactéries, entre autres.

 

Dès l’entrée et sur chaque table du restaurant, nous avons placé des distributeurs de gel.

 

De petits panneaux de signalisation des gestes à respecter ont été placés un peu partout mais de façon esthétique, discrète et élégante. Chacun est ainsi informé de ce qu’il a à faire s’il ne le sait pas encore.

A l’étage, nous avons créé trois espaces individuels, séparés par des voiles blancs et donc donnant une impression de légèreté mais aussi de sécurité. Ces espaces peuvent être ouverts pour permettre aux 15 personnes autorisées actuellement de prendre leur repas à plusieurs.

Enfin, la carte est sur papier et est offerte aux clients. Cela permet l’usage unique de cette carte et aussi un petit cadeau à chacun. Comme cadeau, les premiers clients qui nous ont fait confiance ont également reçu mon dernier livre « Biotope » paru chez Lannoo et que l’on peut aussi se procurer en librairie ou au restaurant. Nous tenons très fort à remercier les clients de revenir et nous leur avons aussi offert un petit pot de confiture de rhubarbe de mon jardin. Et comme nous en avons fait 2000, il en reste encore pour les clients suivants !

Enfin, il faut savoir que toute l’équipe de Pastorale a été testée sur le Coronavirus avant la réouverture et ce test sera répété au moins une fois par mois. Si l’un des membres de l’équipe devait avoir des symptômes ou des doutes, il sera d’office mis en congé afin de ne prendre aucun risque. Chacun en est conscient mais chacun veut aussi continuer à faire partie de l’aventure, alors tout le monde fait autant attention au travail qu’à la maison.

Joëlle : Votre équipe comme vos clients vous ont donc suivis et ont répondu « présents » à chaque étape de ce déconfinement du restaurant ?

Bart : Oui, tout le monde, dans l’équipe, a fait des efforts et m’a beaucoup aidé dans cette nouvelle approche de notre métier je dois dire que j’en suis très heureux. Je suis aussi très fier de mon équipe et vous savez, mes deux filles, Jolien et Karen, sont maintenant avec moi et travaillent à Pastorale. C’est aussi une très belle expérience de travailler avec ses enfants ; la relève est assurée ! Quant aux clients, je dois dire que c’est aussi un grand bonheur de les voir revenir, adopter les consignes sans aucun désagrément ou désaccord. La preuve de leur confiance se transmet dans les réservations et nous avons très vite été complet sur les 4 à 5 premières semaines de réouverture. Du coup, nous resterons ouverts en juillet et août contrairement aux autres années. Et comme nous avons un grand jardin dans lequel nous avons aussi espacé les tables, le confort est assuré et l’expérience de venir s’attabler à Pastorale reste aussi intéressante qu’avant le Coronavirus.

Joëlle : alors, en résumé, quels sont ces 10 fameux commandements ?

Bart : voici en quoi consistent les 10 commandements du coronavirus à Pastorale

  1. Vous n’aurez pas de souci pour vous garer – le stationnement est gratuit à côté de Pastorale, dans la rue et sur la ‘Brooikensplein’.
  2. Vous serez accueilli chaleureusement – les portes sont tenues ouvertes.
  3. Vous utiliserez un désinfectant pour les mains – à l’entrée, pendant le repas et après chaque pause sanitaire.
  4. Vous ne craindrez pas le temps qu’il fait en Belgique – vous pourrez laisser votre manteau en toute sécurité au vestiaire.
  5. Vous vous assiérez sur des chaises et autour de tables désinfectées – avant et après chaque service.
  6. Vous recevrez un menu individuel que vous pourrez emporter chez vous en souvenir.
  7. Vous choisirez votre vin préféré dans un menu digital – désinfecté avant utilisation.
  8. Vous aurez suffisamment de serviettes à table – vous en aurez deux nouvelles pendant le service.
  9. Vous utiliserez des installations sanitaires désinfectées – désinfectées toutes les demi-heures.
  10. Vous paierez de préférence par carte – les espèces restent possibles.

Adresse – Réservation : Restaurant Pastorale** – Laarstraat 22 – 2840 Reet – T 03 844 65 26www.depastorale.be

 

Voir aussi

Interview & Texte : Joëlle Rochette

Photos : Photos : ©Morgane Ball – www.morgane-ball.format.com

Bonus

Pastorale** – Michelin 2020

« Cuisine créative – Epurée – Pastorale est un plaisir pour les yeux autant que pour le palais. Le décor élégant, orné d’œuvres d’art, crée une très belle atmosphère. La sculpture de bois d’Arne Quinze est parfaitement mise en valeur et attire inévitablement le regard, tout comme la statue qui trône dans le paisible jardin. Vous le comprendrez vite, Bart De Pooter est, lui aussi, d’une créativité intarissable. Sa technique raffinée lui permet d’exprimer son inventivité. Il sublime l’assiette par des arômes variés, des variations de textures et des accompagnements divers. Sa cuisine est assez complexe et n’hésite pas à surprendre régulièrement.

La qualité de la viande est prodigieuse. L es idées audacieuses de Bart De Pooter font la part belle aux légumes, à l’image de son menu végétarien. L’offre variée de vins au verre est impressionnante. Qui oserait encore prétendre que la cuisine n’est pas un art ? »

 

Pastorale – 17/20 – Gault&Millau 2020

« Avec son intérieur artistique mais pourtant apaisant, Bart De Pooter a donné à Pastorale une touche d’originalité. Sa cuisine avait déjà une identité dans le domaine des nuances gustatives et des belles associations. Pour l’entrée autour de la poire, pois, pousses de topinambour et surtout un jus au thé matcha, il montre sa capacité à fusionner harmonieusement des saveurs distinctes en toute discrétion. Avec quelques produits, ce chef peut créer un registre très riche dans l’assiette. Un entremets froid aux fines lamelles de calamar et à l’avocat rend la tablée muette. Pour suivre, il démontre son aptitude à réaliser des sauces classiques à un niveau exceptionnellement élevé. Preuve en est la sauce hollandaise qui nappe le merlan parfaitement grillé, salsa verde, pak choï, déclinaison de courgettes et haricots verts. Le carré de porc de Louis Ospital a droit à une garniture remarquable, heureusement peu sucrée mais ô combien savoureuse, d’ananas, maïs doux et orange. Jusqu’à la fin de ce repas de plusieurs services, Bart De Pooter joue avec une telle légèreté et une telle intelligence avec les fruits, les légumes et les fines herbes que c’est un plaisir. Au dessert, deux bols font leur apparition sur la table. L’un accueille une glace au melon et une madeleine digne de Proust ; l’autre révèle du fenouil, une glace au pollen et du jus de citron vert. Nous terminons la soirée dans la bonne humeur en compagnie de sa brigade, professionnelle et bien huilée. »

 

À propos du chef Bart De Pooter et du restaurant Pastorale**

Créatif et presque obsédé par les possibilités de la gastronomie : c’est ainsi qu’on décrit mieux le chef Bart De Pooter. À l’âge de 23 ans et il y a environ trente ans, il a ouvert son propre restaurant « Pastorale » à Reet, un lieu où gastronomie, nature et art se mêlent naturellement. Comme si un restaurant deux étoiles ne suffisait pas à satisfaire ses rêves d’entrepreneur, Bart a lancé plusieurs autres projets pendant des années. Le restaurant POSTUUR à Berchem, son entreprise d’importation et d’exportation de viande de qualité Clara Bella ou s’occuper du catering de 300 000 personnes à Tomorrowland ? You name it, Bart did it. Ses deux filles ont hérité de son amour et de sa passion pour l’hospitalité, car elles travaillent dans ses restaurants et l’assistent dans ses nombreuses initiatives.

 

 

 

 

Le Blog Gastronomique de Joëlle Rochette - l'art de vivre en "Epicurie"

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